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Pavillon Geisendorf, Genève – Réalisation

Programme

Le Pavillon Geisendorf a pour vocation de compléter une école primaire et le centre pédagogique. En plus de sa vocation d’accueil des élèves pour les repas de midi et de leurs activités parascolaires, les locaux parascolaires sont mutualisés avec les associations et habitants du quartier. Le pavillon accueille également des locaux de travail pour les jardiniers de la ville et trois salles pour la pratique musicale amateur.

 

Histoire du projet

Contexte, site et parti architectural

Le pavillon Geisendorf est situé dans un parc public du quartier des Charmilles, l’un des quartiers d’habitation les plus denses de la Ville de Genève. Il vient compléter l’école primaire et le centre pédagogique construits par étapes entre 1953 et 1969 par les architectes Georges Brera et Paul Waltenspühl.

Depuis la création du parc Geisendorf, l’angle nord-ouest du parc ne s’acheva pas selon le projet des architectes à cause d’une maison d’habitation du XIXe qui y subsista et occupée dernièrement par le parascolaire jusqu’à la réalisation du pavillon. Leur projet prévoyait une entrée nord-ouest au parc et ce n’est que soixante ans plus tard que cette idée fut reprise et finalement réalisée grâce la construction du pavillon. La création de cette nouvelle entrée a permis d’ancrer le pavillon dans les aménagements paysagers du parc et de le lier au quartier. L’implantation du pavillon, sa volumétrie et sa géométrie biaise, suivent les principes de composition dispersée des édifices existants. Le bâtiment définit ainsi quatre nouveaux lieux : la nouvelle entrée au parc, la clairière d’entrée au bâtiment, le préau d’école et un nouveau cordon boisé.

L’architecture du pavillon est en continuité avec l’architecture des bâtiments conçus par Waltenspühl et Brera. Les choix architecturaux se caractérisent par l’affirmation d’une structure forte et structurante, la présence d’une toiture souveraine et par l’utilisation de matériaux laissés dans leur plus simple appareil et dans leur rationalité expressive. Les quatre façades sont quasi identiques et elles se différencient entre-elles par l’étirement-écartement des poteaux en bois de mélèze pré-grisaillés. Ce choix architectural le distingue des bâtiments scolaires bi-orientés. A l’intérieur du bâtiment, quatre murs porteurs en blocs de terre compressée disposés en moulin à vent définissent une intériorité en contrepoint des façades largement ouvertes et évoque les autres intériorités des bâtiments scolaires.

 

Performance environnementale

Le bâtiment est alimenté par des diverses sources d’énergies 100% renouvelables se complétant : cent-soixante-quatorze panneaux photovoltaïques et cinq panneaux solaires thermiques sur le toit, sept sondes géothermiques et une pompe à chaleur (sol/eau).

Les performances thermiques des éléments d’enveloppe ont été optimisées dans une approche globale des besoins de chaleur afin d’atteindre les standards de haute performance énergétique (HPE).

Pour ce qui est des besoins en ventilation, les locaux ne disposant pas de fenêtres sont ventilés mécaniquement avec un échangeur de chaleur entre les flux d’air frais et d’air viciés. Les locaux avec fenêtres sont ventilés naturellement avec des ouvrants par les utilisateurs en fonction des besoins.

Pour les besoins en éclairage artificiel, tous les locaux sont éclairés par des sources lumineuses à efficacité lumineuse élevée et basse consommation électrique (A++, A+). Les luminaires installés dans les salles recevant des enfants pour des activités sont sans risque photobiologique (RG0) et leur facteur d’éblouissement (UGR – Unified Glare Rating) est faible.

 

Intégration dans le site et le territoire

L’intégration du pavillon Geisendorf dans le site a été évoquée dans le paragraphe « histoire du projet » et pourrait être résumé par la notion de continuité avec l’existant. L’existant est, dans le cas présent, le lieu créé par les constructions dispersées présentes et les divers espaces du parc Geisendorf. Il ne s’agit pas ici d’une continuité mimétique avec l’existant mais plutôt une continuité de communauté de valeurs, à la fois morphologiques, architecturales et spirituelles. Une attention toute particulière a été portée aux espaces que la forme du bâtiment et son implantation engendrent afin que ceux-ci puissent être nommés, facilement appropriables par les habitants du quartier et faire lieu. Il en ressort quatre lieux caractéristiques: la clairière (devant l’entrée du bâtiment jusqu’aux façades des écoles et des logements), le cordon boisé (devant les locaux des jardiniers), le préau (en relation avec les deux autres bâtiments scolaires) et la pelouse (entre le pavillon et l’école Faller).

Au delà du site, l’architecture du pavillon fait partie du territoire dans lequel il s’insère. Tout d’abord par la provenance des matériaux qu’elle utilise, puis par le travail humain nécessaire à sa mise en œuvre et finalement par les contingences propres à chaque territoire. L’utilisation de la terre comme matériau de construction dans le canton de Genève est emblématique à plus d’un titre. En effet, depuis plusieurs années, les décharges recevant les matériaux d’excavation non pollués sont presque saturées. Pour la seule année 2016, trois millions de tonnes ont été produits pour le seul canton de Genève dont près de 1.2 milion furent exportés en France voisine. Ces transports génèrent du trafic routier et des augmentations de taxes de décharges toujours plus prohibitives. De nombreux autres matériaux sont d’origine suisse comme les différents bois lamellé-collés (mélèze, épicea et frêne) et les profilés en acier des menuiseries de façade. Ces deux matériaux a eux seuls évoquent les savoirs faire helvétiques ainsi que l’image que l’on a du pays.

Au delà de l’intégration au territoire de l’architecture, c’est vers une intégration du terroir de l’architecture qu’il faudrait tendre afin de développer les spécificités et typicités des territoires.

 

Valorisation des savoir-faire et de l’économie locale

Pour la construction du pavillon Geisendorf, plusieurs techniques constructives et matériaux ont été mis en oeuvre. Ces choix constructifs sont sous-tendus par une volonté architecturale que l’on pourrait caractériser de classique. Celle-ci renvoie à la trilogie : socle – corps – couronnement. Ensuite, chaque élément architectural a été matérialisé en opérant des choix dans les techniques contemporaines industrielles ou artisanales, et dans les qualités intrinsèques des matériaux à disposition dans le terroir afin que l’architecture qui en résulte soit en syntonie avec les inclinations sociétales et politiques de la communauté auquel l’édifice est destiné.

Le socle du bâtiment comprenant les locaux en sous-sol a été réalisé en béton armé coulé sur place. La partie visible du socle a été réalisée en dalles préfabriquées de ciment avec agrégats de la carrière de La Sarraz (canton de Vaud).

Le corps du bâtiment a été réalisé quant à lui en divers bois d’origine suisse et en terre extraite directement du sol même du parc Geisendorf. A l’extérieur, les façades sont composées de poteaux en mélèze lamellé-collé. Quatre pignons en ossature bois de sapin isolée thermiquement et revêtus de bardages verticaux en mélèze, contreventent le bâtiment et ferment le dispositif structurel vertical extérieur. A l’intérieur du bâtiment, les quatre murs porteurs ont été maçonnés avec des blocs de terre crue compressée fabriqués avec la terre d’excavation et séchés à l’air sur le site. Cette maçonnerie est complétée par de potelets d’embrasure en frêne et des linteaux filants permettant de servir d’appui à la dalle et à la toiture en bois composées de solives en BLC sapin de 9m de portée. Les solives de la toiture sont renforcées par un platelage multipli en bois et les solives la dalle par une dalle collaborante en béton armé. La toiture-couronnement exposée aux intempéries a été revêtue de tôle d’aluminium, à l’image des autres bâtiments scolaires.

 

Choix techniques, obstacles et solutions

La particularité de ce projet a été l’utilisation d’une partie des terres d’excavation composées d’argiles caillouteuses (170m3 foisonnés). Leur transformation sur le chantier en matériau de construction sous la forme de blocs de terre crue compressée (btc) a été réalisée par une entreprise spécialisée (Terrabloc). Comme aucune norme constructive ne réglemente encore la maçonnerie btc en Suisse, les ingénieurs civils mandataires ont mis en place un essai de portance sur trois murets tests qui a été réalisé et validé par le Laboratoire de Matériaux de Construction de l’EPFL. La terre a été prélevée et tamisée en juin 2017 et s’est poursuivie de juillet à août 2017 par la fabrication in situ de plus de 22’000 blocs avec une presse hydraulique. Les blocs ont été séchés à l’air sous bâche pendant plus de quatre mois avant qu’ils n’atteignent la résistance mécanique nécessaire pour leur utilisation porteuse. Un protocole de sélection des lots de btc a été établi et les lots déclassés ont été utilisés pour réaliser les cloisons non-porteuses des salles de musique.

Les maçons (Alfacto) et charpentiers (Dasta) ont commencé le chantier en avril 2018 par la construction des murs porteurs intérieurs en btc. Au sommet de chaque mur d’étage, les charpentiers ont installé une sablière filante en frêne lamellé-collé pour répartir les charges concentrées dues aux solives en sapin lamellé-collé des planchers ainsi que des colonnettes d’embrasures pour soulager les têtes de murs.

La fabrication de btc sur le site du chantier se confronte à une obstacle majeur et non maîtrisable en Suisse: l’eau de pluie et le gel. Cette particularité climatique a influencé le choix architectural de protéger les murs en terre à l’intérieur de l’enveloppe du bâtiment. Le deuxième obstacle pour une réalisation in situ est l’important besoin d’espace pour le stockage des terres, la fabrication des blocs et leur maturation. Enfin, le troisième obstacle est la méconnaissance de l’important fluage du matériau terre lors de sa mise en charge par les ingénieurs civils et les détails constructifs nécessaires à concevoir pour s’en affranchir.

DR, mars 2021

 

Maître de l’Ouvrage Ville de Genève

Mandataires ARCHITECTES DAVID REFFO ARCHITECTE Sàrl (Julien Audemars, Thomas Bolliger, Benoît Meugniot, David Reffo, Nicola Rigoli, Loïc Zurcher) ARCHITECTE-PAYSAGISTE Klaus HOLZHAUSEN DIRECTION DES TRAVAUX GIRANI & PERRILLAT Direction des Travaux-Architectes Sàrl INGÉNIEURS CIVILS Ratio Bois – ingénieurs hes spécialistes Sàrl, Studio Guscio Sàrl, Normal Office Sàrl INGÉNIEURS ÉLECTRICIENS DSSA ingénieurs conseils SA INGÉNIEURS CHAUFFAGE-VENTILATION Rigot Rieben Engineering SA, M+S Ingénieurs Conseils Sàrl INGÉNIEURS SANITAIRES Bureau Technique Sanitaire Michelle Napolillo INGÉNIEURS ACOUSTICIENS Gartenmann Engineering AG INGÉNIEURS SÉCURITÉ Inexis Sàrl GEOTECHNICIEN : GADZ SA GEOMETRES HKD Géomatique SA PHOTOGRAPHES Didier Jordan / Ville de Genève + Olivier Chamard Photography

Entreprises artisanales TRAVAUX PREPARATOIRES Dorner SA BUCHERONS Les Artisans de l’Arbre Sàrl TERRASSEMENT Perrin Frères SA ELECTRICITE Sedelec SA SANITAIRE ALIMENTATION Dallais SA SANITAIRE BATIMENT Bouygues E&S InTec Suisse SA ASCENSEUR Kone Suisse SA MAÇONNERIE BETON ARME Rampini & Cie SA MAÇONNERIE TERRE CRUE Alfacto SA BLOCS DE TERRE CRUE COMPRESSEE Terrabloc SA VENTILATION Mino SA CHAUFFAGE Mino SA CONSTRUCTION BOIS – FAUX PLAFONDS ACOUSTIQUES Dasta Charpentes Bois SA MENUISERIES FAÇADE AAV Contractors SA FERBLANTERIE COUVERTURE G. Dentan Genève SA ECHAFAUDAGES Von Ro échaufaudages SA ETANCHEITES Etico SA PROTECTIONS SOLAIRES Kästli & Co SA CHAPES Balzan & Immer SA DETECTION INCENDIE Securiton SA CONTROLE D’ACCES Jean Musina SA et Dormakaba SA SONORISATION EVACUATION G&M Electronik AG SOLS MINERAUX Jacques Masson SA PARQUETS BOIS Schneider & Jan SA AGENCEMENTS INTERIEURS Dasta Charpentes Bois SA PORTES INTERIEURES Delta Türsysteme AG CLOISONS MOBILES Rosconi Systems AG CUISINE PROFESSIONNELLE C-TEC System SA CUISINE Amann Cuisines SA PLATRERIE R. Mazzoli SA CARRELAGES Artrans SA PEINTURE Berchten SA SERRURERIE INTERIEURE Arteferro Suisse SA SERRURERIE EXTERIEURE Serrurerie de la Pallanterie SA FAUX-PLAFONDS  KTS DECO Sàrl CENTRALE PHOTOVOLTAÏQUE Sedelec SA AMENAGEMENTS EXTERIEURS Martin Paysage, succursale de Rampini & Cie SA DEMOLITION Orllati (GE) SA BROYAGE SOUCHES CBF Broyage Sàrl SIGNALETIQUE PRO entreprise sociale privée NETTOYAGE DGP Services Sàrl EXTINCTEURS Alpina Woud SA OBTURATIONS COUPE-FEU Fire System SA

Dates CONCOURS ARCHITECTURE 06/2012 CONSTRUCTION 06/2017 – 12/2020

Publications
– construction / bâtiment d’équipements publics, Ville de Genève, 09/2019
– Valérie Hoffmeyer, Le pavillon Geisendorf : né du sol genevois, Tracés n°22, espazium Verlag, Zürich, 2019, pp. 27-31
– Roderick-Hönig, Der Zementanteil ist der Schlüssel, Hochparterre 04/20, Zürich, 2020, pp. 48-53
– Héloïse Gailing, produit du terroir, CONSTRUCTION&BATIMENT n°2 / avril-mai 2021, ESPACES CONTEMPORAINS, Lausanne, 2021, pp. 34-37
– Julien Grisel, Same same, but different, werk, bauen + wohnen n°6/2021, Verlag Werk AG, Zürich, 2021, pp. 66-67
– Stéphanie Hegelbach, Schulpavillon in Genf / Ziegel aus lokalem Aushub, Baunetz_Wissen_, Heinze GmbH | NL Berlin | BauNetz, Berlin, 09/2021, web publishing https://www.baunetzwissen.de/
– Philippe Meier, pavillon Geisendorf, GVARCHI (web guide), Maison de l’Architecture de Genève (MA), Genève, 2021, https://www.gvarchi.ch
– Barbara Zettel, Schulgebäude in Genf, DETAIL Business Information GmbH, München, 11/2022, web publishing https://www.detail.de/
– Helga Blocksdorf, Samuel Barckhausen, Ruben Beilby, PERSONAE, Technische Universität Braunschweig, IKON Institut für Baukonstruktion, Braunschweig, 2023 (ISBN 978-3-927115-96-5)